le CFD LOZERE
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Les premiers projets pour le désenclavement de Florac, sous-préfecture du departement de la Lozère, n’aboutirent pas, le ‘grand’ chemin de fer s’avérant trop coûteux dans cette contrée reculée et fort accidentée. Finalement, ce rôle échut à une ligne dite ‘d’intérêt général’, certes, mais à voie métrique et donc à l’infrastructure d’un secondaire, bien qu’entièrement établie en site propre. Dès 1909 elle relia Florac, centre nerveux de la ligne, à Ste-Cécile-d’Andorge, modeste gare d’échange avec la ‘grande’ ligne Clermont-Ferrand-Nîmes, dite ‘des Cévennes’. En cours de route on comptait sept gares intermédiaires, plus d’une fois établies loin des villages, toutes équipées d’une voie de croisement et d’une ou deux voies de chargement. Drainant tout le sud du département, cette petite ligne d'importance régionale manifeste resta potentiellement rentable jusqu’au bout, mais ne put échapper à la vague de fermetures des années 60. Le 31 mars 1968 le dernier convoi rentra au dépôt de Florac.
Ce n’est qu’après la tentative de reprise malheureusement avortée que les voies et les infrastructures métalliques furent démontées, fin 1971, libérant ainsi la plate-forme ferroviaire pour l’élargissement de la N107bis en grande partie parallèle. Malgré cela, de longues sections – même situées le long de ce qui est devenu la N106 – sont restées quasiment intactes, jusqu’à ce jour. C’est ce magnifique tracé de 49 km avec ses 16 tunnels et un nombre quasi équivalant de viaducs que nous voulons vous faire découvrir aujourd’hui. D’abord sur le versant Atlantique, depuis Florac, dans la vallée de la Mimente. Puis, au-delà du tunnel sous le Col de Jalcreste, dans la vallée du Gardon, sur le versant Méditerranéen.
De Florac à La Salle-Prunet (4 km) Plus grand chose ne subsiste aujourd’hui de la gare de Florac, centre nerveux de la ligne. Peu après le démontage de la voie et la démolition du château d’eau, le tracé ferroviaire fut récupéré pour le contournement routier de la ville. Vers la fin du siècle, c’est le pavillon sanitaire qui succomba, en prélude à la démolition des remises, fin 2009, pour laisser la place à un centre de formation flambant neuf. Reste le bâtiment principal inutilisé et toujours flanqué de sa halle aux marchandises. Ici les derniers projets vont dans le sens d’un centre d’accueil du Parc National des Cévennes. Quant au projet de réhabilitation de l’ancien tracé ferroviaire, celui-ci n'est guère évident sur la première partie du trajet, jusqu’au-delà de La Salle-Prunet (4 km). En effet, lors des travaux d’élargissement de l’actuelle N106, la plate-forme établie en encorbellement au-dessus de la grand route a été rognée, voire complètement rasée en plusieurs endroits. Ce n’est qu’à l'approche de La Salle-Prunet, ainsi que près de l’ancienne halte et à hauteur du village que l'on retrouve plusieurs murs de soutènement et quelques passages supérieurs, la plate-forme restant à ces divers endroits accessible comme chemin local. Jusqu’en 1994 il était encore possible de poursuivre jusqu’au viaduc à 4 arches en maçonnerie sur la Mimente, où le tablier du passage pour la nationale avait disparu. Immédiatement après, la ligne traversait la colline par un tunnel de 86 m, alors que la route devait contourner cet obstacle par un virage fort serré à 180°, les deux artères se croisant à niveau au-delà du tunnel. Dans la logique routière la levée de cet obstacle tombait donc sous le sens, ce qui fut chose faite en 1994. D’abord en déblayant une bonne partie de la colline et du tunnel, ensuite en rasant le viaduc, ce qui permit de redresser le tracé de la N106 en un seul virage à 135°.
Chose curieuse, la culée de l’ancien passage routier ainsi que la portail occidental du tunnel, tous deux accolés à la paroi rocheuse (photo ci-contre), existent toujours, bien que quasiment inaccessibles, alors que de l’autre côté le trou du moignon de tunnel resté intact s'est vu combler. Le long de la Mimente jusqu'au Col de Jalcreste (18 km)
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Peu au-delà du tunnel détruit (km.4) nous retrouvons la plate-forme ex-ferroviaire quasiment intacte et cette fois-ci aisément accessible, bien que située en contrebas de la route pourtant rectifiée par endroits, et qui s’élève progressivement à flanc de vallée. L’ancien tracé quant à lui suit fidèlement la rivière avant de la traverser au km.6,4 et de plonger dans un tunnel de 39 m. Plus loin, un autre viaduc au-dessus d'un vallon affluent, puis en contrebas de la route du Pont-de-Montvert (photo) avant d’aboutir à l’ancienne gare de St-Julien-d’Arpaon (km.8), aujourd’hui simple habitation juste au-delà du village. C’est ici que nous rejoint le GR70 (Route de Stevenson), qui depuis Florac nous suivait sur les hauteurs de la rive opposée.
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Le parcours qui suit, toujours le long de l’étroite vallée de la Mimente, est à notre avis le plus pittoresque de toute la ligne, avec ses deux tunnels (38 et 92 m), plusieurs petits viaducs, ses nombreux ponceaux et murs de soutènement, mais surtout par la rudesse du paysage traversé et de la Montagne du Bougès qui le surplombe. Paradoxalement, c’est depuis la N106 toujours très proche que ce tableau se présente encore le mieux, surtout en automne et vers la fin des longs hivers. Ce n’est qu’au km.12 que ce magnifique parcours croise la nationale où, loin de toute habitation, l’abri et la maisonnette du garde-barrières de la halte Les Crozes sont tous deux quasiment intacts.
Puis, de l’autre côté de la N106 qui continue de s’élever, c’est un scénario analogue au km.4 qui se reproduit, l’ancienne ligne restant en contrebas, coincée entre la route et la rivière, traversant le tunnel des Crozes (73 m) accolé à la grand-route, avant d’atteindre la deuxième gare intermédiaire de la ligne, Cassagnas-Barre (km 15,6). Celle-ci desservait le village de Cassagnas situé plus loin, sur les hauteurs, mais aussi le chef-lieu de canton Barre-des-Cévennes, à plus de 13 km de là! Profondément transformée en gîte d’étape, l'Espace Stevenson, la gare est quasiment méconnaissable, si ce n’est le château d’eau miraculeusement rescapé du ferraillage de la ligne en 1971.
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Au-delà de l’ancien passage à niveau, il y a toujours le petit ‘Hôtel de la Gare’, toutefois abandonné depuis un bon bout de temps déjà. Là c’est le GR72 qui prend la relève sur 2,5 km environ, avec un viaduc sur la Mimente en cours de route. Plus loin, en pleine montée, nous découvrons le majestueux viaduc en courbe du Blocard (km.20,3) avec ses 3 arches de 20 mètres au-dessus du vallon de la Timbasse, ruisselet affluent de la Mimente. Cet ouvrage impressionnant, mais à peine visible depuis la N106, n’est pas à conseiller aux âmes sensibles, car démuni de ses garde-fous – à moins qu'ils n'aient été remplacés depuis. Au-delà, plus aucune trace du passage à niveau suivant avec la grand-route. Au cas où la portion restante de l’ancien tracé ne serait pas accessible, il reste toujours une petite route d’accès, 750 m plus loin, qui nous mène à la gare sommitale du Rouve-Jalcreste (km.21,7), à 788 m d’altitude, et dont le bâtiment ne nous semblait plus habité depuis peu lors de notre passage en 2010.
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Du Col de Jalcreste à Ste-Cécile-d'Andorge (carte Michelin de 1930)
De Jalcreste à St-Privat-de-Vallongue (6 km)
Au-delà du Col de Jalcreste (833 m) le relief bascule et l'ancienne ligne passe dans le bassin de la Méditerranée, dont l’influence ne commencera à se faire sentir réellement que bien au-delà, tout au bout d’une forte descente, lorsqu’on aura presque quitté les Cévennes. Plus de 40 m sous le col, la ligne traversait un tunnel de 345 m, le plus long de tous, mais hélas en très mauvaise posture. Car déjà du temps de l’exploitation il fallut le renforcer avec des cintres d’acier suite à une poussée géologique, Jalcreste se trouvant en fait sur la crête d'un plissement des Cévennes. Et ce qui devait arriver arriva. Quelques années après notre passage en 2010, ce qui restait du portail ouest (photo) et une partie de la voute s’effondrèrent. Quant au portail opposé, plus ou moins accessible depuis la route de St-André-de-Lancize, il semble se porter un peu mieux, même si un des piédroits a déjà cédé.
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Dès la sortie du Tunnel de Jalcreste s'amorce une longue descente, par une pente fort raide variant de 27 à 32 %o – ce qui est beaucoup pour un convoi ferroviaire, tant à la montée qu’à la descente, surtout en automne – afin de rattraper un dénivellé de plus de 400 m sur 15 km (11 km par la route). A partir d’ici le tracé est de nouveau accessible, toujours en contrebas mais à quelque distance de la N106, pour finir par atteindre “La Quille”, 600 m plus loin. A cet endroit peu commun, visible depuis la route, les convois se faufilaient entre la paroi rocheuse quasi verticale et une sorte de gros obélisque tout aussi rocheux, d’où le nom. Juste après, un cable aérien remontait la production d’une mine de baryte à flanc de vallée, jusqu’à un mur de chargement toujours présent le long de la plate-forme ferroviaire, jouxtant le petit Tunnel de la Mine (49 m), pas vraiment creusé mais plutôt construit au gré des installations minières aujourd’hui disparues, à quelques ruines près, blotties dans la végétation.
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le Tunnel de la Mine (49 m), suivi du Tunnel du Castanet (92 m) et du grand mur de soutènement entre l'ancien tracé et la N106 (1 juin 2010)
(tous trois photographiés en direction de Jalcreste)
(tous trois photographiés en direction de Jalcreste)
A moins d’un km c'est la traversée du Tunnel du Castanet - petit hameau tout proche - cette fois-ci bel et bien creusé dans le roc au pied de la grand-route quasiment collée au tracé ferroviaire, à tel point qu’il fallut protéger ce dernier par plusieurs hauts murs de soutènement, miraculeusement réscapés de l’élargissement routier. Mais alors que l’ancien tracé se voit finalement rejoint par la N106, c’est cette dernière qui prend le dessus, avant de se voir quelque peu redressée 200 m plus loin. Plus en retrait, le virage routier ainsi délaissé existe toujours, quoique réaménagé comme route locale vers Marveillac, mais laissant le site de l’ancien passage à niveau à cet endroit quasiment intact.
Juste après la maisonnette de garde, le portail du Tunnel de Cros-Marveillac (115 m) est encore muni de ses deux portes pivotantes, placées jadis afin d'éviter la formation de cônes de glace durant les longs hivers, toujours très rudes en Cévennes. Cette partie du tunnel sert aujourd’hui de débarras, alors que c’est dans les fourrés en retrait de la grand-route qu’il faut chercher sa sortie. LA BOUCLE DE ST-FRÉZAL 1. De St-Privat à St-Frézal-de-Ventalon
De St-Privat-de-Vallongue (610 m) à St-Hilaire-de-Lavit (380 m) ce dénivelé donne à vol d’oiseau une pente de plus de 70 %o, ce qui est beaucoup trop, même pour une ligne à l’allure d’un secondaire comme le CFD. Et donc il fallait bien adapter le tracé en conséqence, moyennant une grande boucle se détachant nettement de la N107bis (actuellement N106) et se frayant un passage à travers deux vallons moyennant un bon nombre d’ouvrages d’art. Ce qui donnera quand-même une déclivité dépassant parfois 32%o, pas facile à franchir, même avec du matériel ‘secondaire’.
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Au-delà, l'ancien tracé ferroviaire est devenu un chemin de campagne, mais la plate-forme a visiblement été grignotée par la N106 en contrebas. Encore heureux que l’on ait pu y maintenir ce passage, et même quelques murs de soutènement, équipés de solides garde-fous, bien nécessaires par endroits. Ce n'est que 500 m plus loin que l'ancienne ligne, toujours à flanc de côteau et restée intacte à partir de là, s’éloigne de la route et poursuit jusqu’à l’ancienne gare de St-Privat-de-Vallongue 2 km plus loin, aujourd’hui la mairie du village, mais toujours bien reconnaissable en tant que telle.
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Déjà bien avant la gare de St-Privat-de-Vallongue [A] la voie ferrée se détachait progressivement de la nationale, ce qu’elle fera encore plus au-delà, toujours en pleine descente, en suivant cette fois-ci la route locale D29. Au-delà du tunnel de La Blacherette (90 m) [B], situé dans une courbe à 90° assez serrée près du hameau éponyme, l’ancienne ligne s’engage dans le vallon de Soubrelargues où coule un autre Gardon, affluent du Gardon d’Alès. Depuis ce tracé à flanc de montagne, la vue vers le haut des Cévennes doit être superbe, mais pas lorsque les arbres sont tout en feuilles en cette fin de mai. Sur ce tronçon, dans le gravier du ballast, on retrouve pas mal d’anciennes traverses, laissées là lors du démontage de 1971-72. En cours de route nous découvrons soudain la gare suivante (St-Frézal-de-Ventalon) [G], à moins de 300 mètres, en contrebas sur le flanc opposé, alors que par la plate-forme ferroviaire il faut encore 2,5 km avant de l’atteindre (voir plan).
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Lors de notre passage en 2010, le tunnel suivant, celui des Espérelles (264 m) [C], était barré, vu le risque de chûte de pierres se détachant de la voûte. Depuis, l’ouvrage aurait quelque peu été reconforté, voire réparé, le rendant peut-être de nouveau accessible. Sinon, un long détour est (était?) nécessaire pour atteindre l’autre embouchure, située à l’extrémité d’un premier lacet à 180° et immédiatement suivi d’un pont sur un affluent et de la maison de garde du passage à niveau de La Vignette, jadis halte facultative. Peu après, nous traversons le Gardon sur un viaduc à trois arches (1 de 20m et 2 de 7m) [D], précédé d’un passage inférieur livrant jadis passage au GC29, chemin local rectifié depuis en empruntant le viaduc dégarni de ses rails.
Et donc nous voilà d’un coup tout en haut du fleuron de cette belle boucle, un mur de soutènement monumental de plus de 30 m de haut [E], sans garde-fou, dominant bien haut la D29 qui rejoint ici l’ancien tracé. Quelle construction magistrale, et cela sur une ligne si modeste! Tout de suite après nous pénétrons à l’intérieur des 78 m du tunnel en courbe du Soleyret (ou de St-Frézal)[F], pour déboucher sous le portail nord, presque aussi imposant grâce au mur de soutènement du GC29 qui le surplombe.
Au-delà de l’ancien passage à niveau, la gare de St-Frézal-de-Ventalon [G], encadrée par deux grands murs de soutènement, reste blottie derrière les frondaisons en plein épanouissement en cette fin de mai, alors que s’installe le printemps montagnard. Au-delà, la plate-forme ferroviaire, gardée par une barrière, reste cependant accessible à tout randonneur et cycliste. |
Pas plus que St-Privat-de-Vallongue, la commune de St-Frézal-de-Ventalon (devenue Ventalon-en-Cévennes depuis la fusion avec St-Andéol-de-Clerguemort) ne dispose d’un village-centre proprement dit, mais est constituée de nombreux petits hameaux (ou masades), la gare de jadis étant située à distance raisonnable d’un bon nombre de ceux-ci. D'autre part, comme la dénomination des divers cours d'eau dans ce secteur n'est pas claire, nous nous référons à celles de la carte topographique de l'IGN Français.
2. De St-Frézal à St-Hilaire-de-Lavit
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Au-delà de la gare de St-Frézal, l’ancien tracé poursuit sa lancée à flanc de vallée, longeant d’abord le Gardon, puis le vallon du Ruisseau de Conches, dont l'embouchure est trop large à traverser, ce qui nous livre un beau lacet à 180° au bout duquel on arrive au Viaduc de Cessenade. Cet ouvrage en courbe, le plus haut de la ligne, comprend 2 arches de 20 m et 2 de 12 mètres et permet le passage sur le versant opposé, avant de rejoindre la vallée du Gardon peu avant le pont de Champernal, où la N106 traverse la rivière en un lacet à 180° elle aussi, en face du hameau de La Blacherette distant d’à peine 500 m à vol d’oiseau, mais de 4 km par la voie ferrée! Alors qu’à première vue nous venons de ‘fermer’ la boucle, ce n’en est pas fini de la longue descente en pente continue de plus de 30%o, avec un agréable tracé offrant de beaux points de vue, dominant la grand-route du haut de plusieurs murs de soutènement, et où de nombreuses traverses sont toujours en place, plus d’une encore en bon état.
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Au-delà du km.34, près du Burjas, c’est un ouvrage élégant à une seule arche de 20 m qui côtoie une portion abandonnée de la nationale, redressée afin de couper court comme en d’autres endroits tout au long de cet itinéraire - sans oublier ce beau mur de soutènement près de l’ancienne halte de La Farelle. Un bon kilomètre plus loin, on retrouve le même scénario, cette fois-ci à hauteur du Viaduc de Corbières, bel ouvrage en courbe à 4 arches de 12 m, traversant le ravin de Pépi avant de s’engouffrer dans le Tunnel de Corbières (197 m). Tracé en S, il est le troisième en importance de la ligne, et le dernier que nous rencontrons sur cette rude descente amorcée dès la gare de St-Privat. Au-delà de sa sortie, perdue dans la nature, l’ancienne plate-forme ferroviaire a tôt fait de rejoindre l’inévitable N106, mais hélas, pour se voir tronquée de ses derniers 200 mètres peu avant l’entrée en gare de St-Hilaire-de-Lavit. C’est que l’abandon et le démontage de la ligne furent bien vite mis à profit pour - une fois de plus - redresser la route qui jusqu’alors effectuait un crochet autour de la gare. Et voilà donc cette dernière coincée entre l’ancienne N107bis et l’actuelle N106 ayant accaparé la totalité de l’emplacement ferroviaire.
La gare de St-Hilaire-de-Lavit, coincée entre la N106 (côté quai)
et l'ancienne N107bis (à droite) (31 mai 2010) |
Du coup, nous voilà arrivés au bout de cette longue portion de 32 km, quasi ininterrompue depuis le tunnel détruit de La Salle-Prunet. Or, au-delà de la gare de St-Hilaire-de-Lavit, c’est l’actuelle N106 qui a pris le dessus, une bonne partie du tracé ferroviaire ayant été sacrifiée sur l’autel de l’élargissement de cette route nationale. Mais contrairement à ce que nous avions cru comprendre, il ne reste pas mal de vestiges à découvrir, ainsi que plusieurs portions de l'ancienne plate-forme, même si lors de notre visite en 2010 nous n'avons pu explorer la section terminale en entier.
DE ST-HILAIRE à LE COLLET-DE-DÈZE (6 km)
Au-delà de la gare de St-Hilaire-de-Lavit les excavatrices n’ont laissé qu’une étroite corniche collée à la paroi rocheuse. Peu après nous retrouvons cependant le mur de soutènement, intact et bien visible sur une bonne centaine de mètres. Jusqu’à l’étroit lacet de la N106 à hauteur du Moulin, où l’ancienne ligne coupe court à travers la colline, avec un tunnel en courbe de 114 m. Mais quelques dizaines de mètres après, un profond à pic nous oblige à battre en retraite. En bas (photo ci-après), il faut bien se rendre à l’évidence: de la plate-forme ferroviaire, déblayée afin de redresser la route nationale, il ne reste plus rien. Tout au plus les pauvres restes d’un dalot, ainsi que le portail sud du tunnel, perdu quelque part entre ciel et terre, dans les bosquets à flanc de colline.
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Au-delà, à quelques courtes sections près, il ne reste plus grand chose du tracé ferroviaire, ni même à hauteur de St-Michel-de-Dèze, où la plate-forme abandonnée passant derrière les maisons a fait les frais d’un contournement routier. Ce n’est qu’à l’approche du Collet-de-Dèze, village pittoresque et relativement important, que nous retrouvons l’ancien tracé, ponctué par un haut mur de soutènement en face des habitations, près de l’ancienne halte ‘Pont-de-Saunier’. Là, un sentier escarpé nous permet d’atteindre la plate-forme ferroviaire, asphaltée comme chemin local, bien haut au-dessus de la N106 que nous quittons progressivement avant de traverser un affluent du Gardon (le Dourdon) sur un élégant viaduc à deux arches de 25 m, dûment sécurisé. Puis, en cherchant la suite, nous retrouvons l’ancien tracé blotti derrière les maisons, avant qu’il ne s’engouffre dans un petit tunnel de 58 m débouchant sur l’ancienne gare, intégrée dans le complexe d’une maison de repos et à peine reconnaissable, si ce n’est l’écriteau “Le Collet-de-Dèze” récemment repeint sur une de ses facades latérales.
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DU COLLET-DE-DÈZE à STE-CÉCILE-D'ANDORGE
Au-delà du Collet le tracé est relativement facile à suivre, avec d’abord le Viaduc de l’Usine (4 arches de 12 m), dominant de haut la N106 parallèle, ensuite à flanc de vallée, avant d’atteindre la halte de La Devèze, 3 km plus loin, où l’abri et la maisonnette sont encore en bon état. Quelques 250 m plus loin, à hauteur de quelques habitations en retrait, la piste s’arrête brusquement, peu avant le viaduc de la Devèze coupant net l’étroit mais profond Valat des Combes. A cet endroit, où la N107bis de jadis décrivait un lacet serré à 180°, la ligne traversait la grand-route moyennant deux ouvrages métalliques encadrant un viaduc courbe en maçonnerie, à 4 arches de 12 m également, et dont les hauts piliers semblent chercher en vain les profondeurs du vallon. Lors du démantèlement de 1971-72, les deux tabliers furent découpés, laissant l’ouvrage isolé entre deux trous béants laissant libre cours au trafic routier. Plus tard cependant, la route fut rectifiée , laissant le lacet presque aussi délaissé que la plate-forme ferroviaire interrompue. Un site hallucinant, de plus en plus étouffé par la verdure saisonnière.
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L’état de l’ancienne plate-forme au-delà de cette césure ne nous est pas connu: envahi par la végétation? privatisé, voire disparu par endroits? Le premier projet de réhabilitation semblait vouloir contourner cette partie du tracé par un sentier sur les hauteurs. En attendant mieux? Quoiqu’il en soit, c’est à l’ancien arrêt de St-Juline-des-Points qu’une surprise de taille nous attend: une voie étroite (40 cm), un évitement avec quai, ainsi qu’un pont tournant. Renseignements pris, l’ultime section du CFD - 1,5 km jusque Ste-Cécile-d’Andorge (Gard) - voit à nouveau rouler des trains, en exploitation touristique, et ce depuis 2009. Ni l’écartement, ni le matériel à échelle réduite ne sont en mesure de ressusciter le CFD défunt. Mais ce qui compte pour nous, c’est la sauvegarde de cette magnifique section, comprenant le 16e tunnel, celui de Bramefont (82 m), et, peu avant le terminus, le Viaduc de l’Andorge, avec ses 4 arches de 25 m le plus grand de la ligne (celui de Cessenade étant le plus haut). Dommage toutefois que nous n’ayons plus eu le temps d’aller visiter ces deux merveilles. Une autre fois alors?
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Pour suivre un de ces parcours à pied, même partiellement, tenez compte d'assez longs trajets aller-retour, sans possibilité de couper court ni de rejoindre la N106. Ainsi, la portion très pittoresque de St-Julien d’Arpaon à Les Crozes fait 8 km aller-retour. Et attention aux vipères, très présentes en Cévennes, raffolant des schistes et des pierrailles du ballast ferroviaire rechauffés par le soleil. Pour suivre l'ancien tracé à distance, ne pas oublier que la N106 reste une route à deux bandes de circulation, équipée de rails de protection sur de longs trajets, et que vouloir s'arrêter n'importe où n'est pas sans risques. Mieux vaut donc effectuer cette manoeuvre à l'une ou l'autre bifurcation.
EPILOGUE
Après les déstructions perpétrées pour l’élargissement de la N106 actuelle, ces deux initiatives nous donnent espoir pour ce qui reste de ce tracé ferroviaire unique. Les petits trains du TAC (Train de l'Andorge en Cévennes) ont beau être des répliques de matériel SNCF, sans la moindre apparenté avec l’ancienne exploitation métrique – et c’est là surtout que les opinions divergent – mieux vaut cela que rien du tout. D’autre part, il semble que CéFéDé, l’organisation impliquée dans la réhabilitation du tracé, veuille avant tout rendre celui-ci de nouveau accessible pour les nombreux randonneurs, sans pour cela vouloir le couvrir d’une couche de bitume comme cela se passe trop souvent. Sinon, ce serait une vraie catastrophe dans ce merveilleux environnement naturel qu’est le Parc National des Cévennes. Une N106, cela suffit! Quant à nous, nous ne demandons pas mieux que de retourner là-bas, pour combler tous les hiatus qui nous restent, surtout le long de la Mimente, mais tout aussi bien pour revivre cette contrée attachante que sont les Cévennes. Si ce n’étaient le temps et la distance…
Quoi qu’il en soit, nous espérons avoir brossé un tableau fort fiable de l’actuel tracé CFD, même si cela nous a coûté (beaucoup) plus d’énergie que prévu. Un tracé de 49 km, ce n’est pas une mince affaire, mais cela valait vraiment le coup.
Après les déstructions perpétrées pour l’élargissement de la N106 actuelle, ces deux initiatives nous donnent espoir pour ce qui reste de ce tracé ferroviaire unique. Les petits trains du TAC (Train de l'Andorge en Cévennes) ont beau être des répliques de matériel SNCF, sans la moindre apparenté avec l’ancienne exploitation métrique – et c’est là surtout que les opinions divergent – mieux vaut cela que rien du tout. D’autre part, il semble que CéFéDé, l’organisation impliquée dans la réhabilitation du tracé, veuille avant tout rendre celui-ci de nouveau accessible pour les nombreux randonneurs, sans pour cela vouloir le couvrir d’une couche de bitume comme cela se passe trop souvent. Sinon, ce serait une vraie catastrophe dans ce merveilleux environnement naturel qu’est le Parc National des Cévennes. Une N106, cela suffit! Quant à nous, nous ne demandons pas mieux que de retourner là-bas, pour combler tous les hiatus qui nous restent, surtout le long de la Mimente, mais tout aussi bien pour revivre cette contrée attachante que sont les Cévennes. Si ce n’étaient le temps et la distance…
Quoi qu’il en soit, nous espérons avoir brossé un tableau fort fiable de l’actuel tracé CFD, même si cela nous a coûté (beaucoup) plus d’énergie que prévu. Un tracé de 49 km, ce n’est pas une mince affaire, mais cela valait vraiment le coup.
Nos sources
L’excellent ouvrage “Le Chemin de Fer Départemental de la Lozère” de Joël Royer (Editions du Cabri, Breil-sur-Roya, 2001), richement illustré, nous a été bien utile lors de nos préparatifs pour l’expédition de 2010, ainsi que pour l’élaboration de ce dossier, même si ce livre décrit avant tout l’exploitation et le personnel CFD. Sur le terrain, c’est la carte bleue topographique 2740ET “Corniche des Cévennes” (IGN, 1992) qui nous a bien aidé à nous repérer, et qui par après nous a permis de nous y retrouver dans la foule de toponymes locaux. La rédaction de ce dossier spécifique n’aurait toutefois pas été possible sans avoir visité nous-mêmes les lieux, même si quelque fois nous avons dû faire appel à GoogleEarth. Sans oublier les données de ITFF, ainsi que les nombreux sites web, chacun avec son brin d’information, trop pour les citer tous ici.
L’excellent ouvrage “Le Chemin de Fer Départemental de la Lozère” de Joël Royer (Editions du Cabri, Breil-sur-Roya, 2001), richement illustré, nous a été bien utile lors de nos préparatifs pour l’expédition de 2010, ainsi que pour l’élaboration de ce dossier, même si ce livre décrit avant tout l’exploitation et le personnel CFD. Sur le terrain, c’est la carte bleue topographique 2740ET “Corniche des Cévennes” (IGN, 1992) qui nous a bien aidé à nous repérer, et qui par après nous a permis de nous y retrouver dans la foule de toponymes locaux. La rédaction de ce dossier spécifique n’aurait toutefois pas été possible sans avoir visité nous-mêmes les lieux, même si quelque fois nous avons dû faire appel à GoogleEarth. Sans oublier les données de ITFF, ainsi que les nombreux sites web, chacun avec son brin d’information, trop pour les citer tous ici.
ATTENTION!
Cette page ne comprend qu'un choix forcément limité des photos disponibles.
Vous en trouverez d'autres sur les pages originelles (en langue néerlandaise).
mis à jour: 23-10-2017
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